Les curieux événements qui font le sujet de cette chronique se sont produits
en 194., à Oran. De l'avis général, ils n'y étaient pas à leur place, sortant un peu
de l'ordinaire. À première vue, Oran est, en effet, une ville ordinaire et rien de plus
qu'une préfecture française de la côte algérienne.
La cité elle-même, on doit l’avouer, est laide.
D’aspect tranquille, il faut quelque temps pour apercevoir ce qui la rend différente
de tant d’autres villes commerçantes, sous toutes les latitudes.
Comment faire imaginer, par exemple, une ville sans pigeons, sans arbres et sans
jardins, où l’on ne rencontre ni battements d’ailes ni froissements de feuilles, un lieu
neutre pour tout dire ? Le changement des saisons ne s’y lit que dans le ciel.
Le printemps s’annonce seulement par la qualité de l’air ou par les corbeilles de
fleurs que des petits vendeurs ramènent des banlieues ; c’est un printemps qu’on vend
sur les marchés. Pendant l’été, le soleil incendie les maisons trop sèches et couvre
les murs d’une cendre grise ; on ne peut plus vivre alors que dans l’ombre des volets
clos. En automne, c’est, au contraire, un déluge de boue. Les beaux jours viennent
seulement en hiver.